Public chéri,

Aujourd’hui, alors que je tartinais mon corps de crème solaire installée sur ma serviette au bord du lac de Paladru, j’ai soudain pris conscience que la rentrée des classes approchait à grand pas. Non pas que mes petits-enfants vont faire la leur (je n’en ai pas), ni que j’ai décidé de repasser mon certificat d’étude… non non, rien de tout ça… C’est juste que la nostalgie de mes propres mois de septembre m’a prise, là, au bord de ce lac, et, comme une envie de cartables, de trousses et de crayons, de tables de multiplications et autres poésies, l’enfance s’est mise à me défiler devant les lunettes. Ça m’a arrêtée net dans le tartinage et j’ai pris un coup de soleil du côté gauche, l’autre côté étant protégé. La nostalgie, ça me fait toujours ça, ça m’arrête les mouvements.

Alors, public chéri, j’ai décidé de tout vous raconter. Tout reprendre à zéro. Repartir du début. Avant la guerre. Les deux même. Avant, bien avant même. Quand j’étais encore dans les couillettes d’Eusèbe, feu mon père. Non, même encore avant ça. En 1874, à Budapest (c’était encore l’Autriche Hongrie, c’est dire si ça date). Tout a commencé en mars 1874 avec la naissance d’Harry. Pas Harry Potter, pas Harry Covert ni Harry Callahan, non… Harry… Le seul, l’unique Harry H. Grâce à Harry, ma vie a changé et celle de toute ma famille sur plusieurs générations. Désormais, les Grimbuche savent faire apparaître des colombes dans des chapeaux et couper des bras sans qu’une seule goutte de sang ne coule (un seul incident est à déplorer mais c’était avant la formation « Deviens un magicien professionnel en six leçons » et mon stage de perfectionnement de la magie organisé par la maison de retraite de Bouzigue les Triche et puis, hein, on peut encore bien se gratter avec un seul bras).

Voilà à quoi me fait penser la rentrée des classes, à l’histoire de ma famille et à Roger aussi, mon fils ma bataille. C’est moi qui lui ai tout appris. Tout ! Parce que c’est pas à l’école qu’il a appris à multiplier les cuillères et à défaire les nœuds de foulard. C’est à la maison, avec maman.  Alors du coup, il s’est beaucoup exercé à l’école avec ses petits camarades. Rien de mieux que l’apprentissage en famille. Bon, on a bien eu un problème avec les parents du petit Jeannot quand il s’est noyé parce qu’il n’a pas eu le temps de défaire ses chaines au fond du bassin… Roger lui avait tout bien expliqué pourtant mais le pauvre, il a été trop lent. C’était pas de sa faute, il était lent, on n’y pouvait rien. Les parents en ont fait toute une histoire. Ils ont été d’un désagréable. Mais soyez rassurés, Roger s’est excusé, j’ai insisté pour qu’il le fasse. Chez les Grimbuche, on est bien élevés.

Mais je m’égare, je m’égare… Revenons à Harry H… je vous laisse deviner qui il est. Celui qui trouve gagne un filet garni et mes bas de contention.

A très vite mes petits Loulous,

Marie-Rose

 

 

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